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Témoignages d’experts : agir face au changement climatique

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Le changement climatique transforme déjà nos paysages, notre agriculture et nos modes de vie. Avec Labo P.O, le Département engage élus, experts et citoyens pour comprendre ces enjeux et construire des solutions concrètes.

Retrouvez l’intégralité des interviews de Serge Zaka, Ludwig Wolfgang et Elodie Magnanou Pham offrent un panorama concret et inspirant des actions possibles sur notre territoire.
L’objectif de Labo P.O est clair : fournir les connaissances et les outils pour que chacun puisse agir dès aujourd’hui et construire un territoire résilient face aux risques climatiques.

SERGE ZAKADocteur en agroclimatologie
Président-Fondateur d’Agro Climat 2050

La sécheresse que connaît votre territoire depuis 2022 a atteint un niveau exceptionnel : pour la première fois, les scientifiques ont relevé un taux de mortalité des arbres important, notamment dans la forêt de la Massane qui est une vieille forêt de hêtres et dans les vergers. Le paysage en a été modifié. On a vu une forme de dépérissement des paysages, des vignes et des terres agricoles délaissées. Mais ce qui arrive chez vous et qui est aujourd’hui un cas particulier ne le sera pas en 2050. Cette sécheresse concernera aussi les autres territoires d’Occitanie d’abord et s’étendra sur tout le sud-est du pays. En ce sens, Labo P.O est une bonne initiative.

Cette démarche est très originale car avec Labo P.O, on dépasse les clivages. Les élu.es qui sont les décideurs sur les territoires sont associés d’emblée. On va au cœur des sujets. Il faut que tous les acteurs travaillent ensemble. C’est la force du collectif qui nous fera sortir de la crise.

Prenons l’exemple de l’agriculture. C’est un des premiers leviers d’action ! Au lieu d’avoir une vision à court terme, anticipons une vision à long terme ! Demain, ne faudrait-il pas plus d’orangers, de pistachiers par exemple ? On sait que le pistachier, contrairement à l’abricotier, est 20 à 30 % plus résistant face à la sécheresse et aux fortes chaleurs. Ce que je veux dire c’est qu’il ne faut pas s’entêter : l’abricot rouge du Roussillon par exemple ne semble plus adapté à la région. Avec le réchauffement, on le produira plutôt du côté de Lyon ou Agen. Pour l’abricot, il y a de nouvelles variétés à développer, comme le groupe Colorado, qui sont plus adaptées aux Pyrénées-Orientales d’aujourd’hui. De nouvelles filières seraient à structurer comme le kaki, les anones, les grenades…C’est là où les élus, les acteurs locaux, la chambre d’agriculture, avec l’État, ont un rôle très important à jouer pour développer, structurer ces filières, créer les conditions de développement de nouveaux marchés pour que demain, les agriculteurs puissent en vivre ! Pourquoi pas organiser la fête du kaki, de la figue, de la grenade, de l’olivier ? Les proposer dans les cantines scolaires, les restaurants d’entreprise… Il faut créer les conditions de nouveaux débouchés. Il en va de notre souveraineté alimentaire.

Bien sûr ! En tout cas, c’est le rôle des acteurs locaux et de l’État que de l’organiser. Prenons l’exemple de l’eau…Il y a des décisions à prendre. Quel mode de développement souhaitez-vous ? Est-ce qu’on délaisse la culture de l’artichaut au profit du développement de gros complexes hôteliers ? Est-ce que nous continuons, malgré cette crise de l’eau, à construire des golfs ? Arrêtons de penser que l’accès à eau est illimité ! Il faut avoir une vision globale. La course au court terme et à l’argent n’est pas la solution ! La croissance économique du territoire n’est pas viable dans un contexte climatique vulnérable.

Elodie Maganou CNRSIngénieure de recherche CNRS
à l’Observatoire Océanologique de Banyuls-sur-Mer

Ce partage d’expérience des élu·e·s du territoire et de connaissances des experts et scientifiques, est riche d’enseignements et cela nous montre que le changement climatique n’est plus une hypothèse mais qu’il s’impose à nous aujourd’hui ! Ces journées ont été l’occasion de montrer que finalement les solutions, on les connaît. Nous avons donc les moyens d’anticiper pour demain. Avec ce que Labo P.O nous a montré et enseigné, on ne pourra plus dire qu’on était pas au courant !

Les solutions vont toucher tous les secteurs : l’urbanisme, l’agriculture, les loisirs… Sur la côte, il faudra revoir les plans d’urbanisme pour ne pas construire au ras de l’eau puisqu’on sait que toute la Méditerranée va « gonfler » parce qu’elle sera plus chaude. Son niveau va monter. Il faudra même reculer certaines constructions existantes ! L’érosion du littoral que nous constatons aujourd’hui s’explique aussi par la façon dont on l’a aménagé. Demain, on ne pourra plus faire comme hier, construire dans des zones qui seront inondables. Il faut voir la nature comme un allié et non pas comme un frein. Les décisions de demain doivent passer par le prisme de la biodiversité : comment va-t-on végétaliser les cours d’eau pour tamponner les effets des crues, limiter les pollutions ? Il convient aussi de bien choisir sa stratégie de reboisement et d’encourager davantage le pastoralisme pour entretenir les parcelles et lutter contre les feux. L’eau est une ressource rare et précieuse dans notre département. Dans nos jardins ou en agriculture, il faut favoriser les essences locales ou celles qui ont peu besoin d’eau. C’est ce que le Département fait d’ailleurs très bien avec la pépinière départementale, auprès des communes. Il convient aussi de planter plus de haies pour maintenir l’eau du sol et éviter par exemple des inondations ou l’érosion. Autre exemple, afin d’éviter que chacun ait sa propre piscine, pourquoi ne pas imaginer de construire des piscines collectives par quartiers ? On sait aussi que demain, il faudra que nos habitations soient construites et équipées différemment face à la chaleur et au risque incendie. Quelles politiques incitatives peuvent aider chacun, chacune à agir à son échelle ?

Il faut agir sur le plan personnel et collectif. Par exemple, demain, les pluies auront tendance à être plus rares mais plus violentes. Nous pouvons agir au niveau local en facilitant la pénétration de l’eau dans le sol. À nous de prendre les bonnes décisions pour agir sur la façon dont la pluie est réceptionnée et utilisée sur notre territoire. On peut agir personnellement et collectivement. Labo P.O nous a fourni un « bulletin météo » pour savoir où on va ! À nous d’agir maintenant !

photo wludwigProfesseur à l’Université de Perpignan

Directeur du Cefrem, Centre de Formation et de Recherche sur les Environnements Méditerranéens

Cette démarche de concertation est très pertinente, car on y arrivera que si les solutions sont partagées, acceptées collectivement ! Le changement climatique, la baisse du niveau de nos trois fleuves, nous, en tant qu’universitaires, nous les observons déjà depuis plus de 15 ans. Le problème, aujourd’hui, est que nous sommes face à la crise et nous devons nous adapter, mais il faudra du temps et cette temporalité n’est pas facile à prendre en considération autant pour les politiques que pour les habitants. Face à ces changements structurels qui s’imposent à nous, il faut se donner les moyens d’agir dans la durée. On ne change pas la trajectoire de nos pratiques du jour au lendemain.

Oui. Si nous voulons sécuriser le moyen et le long terme, il faudra savoir renoncer à certaines pratiques dans l’immédiat. Chacun de nous dans sa vie est capable d’en faire pour l’avenir de ses enfants. Collectivement, il conviendrait d’adopter cette même démarche. Nous devons accompagner l’évolution de notre agriculture qui est devenue très vulnérable. Aujourd’hui, la majorité des agriculteurs n’a pas les moyens de s’adapter. Certes, nous avons les moyens techniques, faire venir l’eau du Rhône par exemple. Mais attention, si ça nous empêche de nous adapter plus structurellement, cette « solution » se révélera vite comme un cadeau empoissonné.
Attention aussi aux possibles conflits d’usage de l’eau que cela peut engendrer, il est peu probable que tout le monde ait les moyens de profiter de cette eau qui sera plus chère. Il faut d’abord se poser la question de quelle gestion souhaitons-nous pratiquer sur notre territoire pour que l’eau reste accessible à tous. Face aux nouvelles réalités, nous ne pouvons pas éviter la sobriété et faire jouer nos solidarités.

Pour aller plus loin : Rubrique Labo P.O

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